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Photo du rédacteurNadine Eid

Stabilité Temporaire

Dernière mise à jour : 29 mai

17  mai 2024 à 20h

Du 29 juin au 21 juillet à 15h10 Relâche le mardi

Au Théâtre de l’Optimist

Rue Guillaume Puy Avignon

Crédit photos: Philippe Hanula



« Rien n'est jamais acquis à l'homme : ni sa force, ni sa faiblesse ni son coeur ; et quand il croit ouvrir ses bras, son ombre est celle d'une croix ; et quand il croit serrer son bonheur, il le broie. Sa vie est un étrange et douloureux divorce…

  Il n'y a pas d’amour heureux. »

Aragon



Quelle belle sortie de résidence que celle de stabilité temporaire !

A l’Optimist, la salle comble l’a saluée et appréciée comme une avant-première.

Trois fauteuils, deux personnages présents interprétant lui, trois  personnages, elle, deux. D’emblée, à l’instar du titre oxymoron, le public aurait pu être dérouté. Il n’en est rien été, son attention a suivi le cheminement alterné des rôles remarquablement interprétés par Pascale Tronche et Grégoire Aubert. La mise en scène est du cousu main. Sobre, élégante, efficace. Dominique Fataccioli a su lire le texte de Grégoire Aubert et travailler à en rendre toute la complexité et la subtilité.

L’écriture est riche, le jeu des deux comédiens stupéfiant et le public rivé à leurs interprétations.


Trois fauteuils pour deux, il en reste un, pour quatre personnages, il en manque un. Il y a du trop et du trop peu sur ce plateau. S’agit il d’un point de vue mal adapté, comme du reste tout point de vu réducteur ? Est-il plutôt question de la perception de nos ressentis partagés différemment, amplifiés à souhait, ou vécus sans considération ? Les paroles finales confiées à Valérie

nous livrent une piste vertigineuse.

Deux couples, Valérie et Romain, Jeanne et Vincent et un protagoniste omniprésent Francis qui à lui seul, stigmatise le monstre existant en chacun de nous, le criminel latent, l’assassin qui sommeille prêt à tuer pour mieux s’immoler sur l’autel de toutes nos possibles noirceurs, de tous nos manquements destructeurs.

L’immense petite absente Léa, le foulard rouge sang sur la chaise vide de l’absence qui mutile, celle qui fait basculer irrémédiablement vers notre finitude, la dessine en manque. La musique et les sons  signés par Lwada la disent puissamment  en filigrane. Elle envahit peu à peu l’espace du couple Valérie et Romain. Deux mondes alors les fracturent tout comme leurs regards échangés avaient fait basculer leurs vies  établies lors de leur rencontre. Le possible et l’inconcevable.

Jeanne, femme broyée dans sa chair de mère, immuablement vivante continuera à respirer avec volonté pour Léa, sa fille défunte. Romain par contre, affirmé dans ses acquis, sommairement campé dans ses certitudes sera happé vers son autodestruction. Croyant rendre justice en vengeant dans le sang l’assassinat de Léa, il se condamne à l’inhumanité en donnant la mort à son tour. La stabilité n’existe pas.


Les rôles incarnés par les deux comédiens dans une temporalité en regard du passé/ présent n’y changent rien.Valérie en talons haut ou Jeanne en baskets  changent de chaussures pour marcher dans un autre rôle très stéréotypé. Néanmoins ces deux femmes aux antipodes se rejoignent en une même étrange fonction avouée : regarder chuter les hommes.

Dominique Fataccioli a misé sur l’écriture de Grégoire Aubert qui pratique dans son jeu le métalangage. Quel que soit le rôle endossé, sa gestuelle, ses mimiques questionnent ses paroles. Sitôt proférées, en silence son corps  les infirme, les  récuse ou les corrobore en hyperbole. C’est époustouflant de voir à quel point il parvient à mettre en doute et en questionnements ses rôles.

Janus antinomique de Romain /Vincent, le déséquilibre de Francis concilie les opposés et peut être construit un seul et même personnage dans sa faiblesse, sa puissance et sa monstruosité.En face, protéiforme à souhait Pascale Tronche, Valérie colle à ses propos, affirme ses paroles avec son corps, puis attend et regarde. Au final elle est apte à livrer une clef qui désunit les liens et renvoie le public à sa propre interrogation sur sa pulsion scopique.

Alors oui, bien évidemment la stabilité est temporaire.


Nadine Eid

   

 

Texte de Grégoire Aubert

Mise en scène Dominique Fataccioli

Avec Pascale Tronche et Grégoire Aubert

Attachée de presse: Dominique Lhotte

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Nous sommes Fanny Inesta et Jean-Michel Gautier, chroniqueurs indépendants et surtout passionnés de théâtre, d’expositions, et de culture en général. A ce jour, nous créons notre propre site, avec nos coups de coeur et parfois nos coups de griffes… que nous partageons avec vous.

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