La parenthèse du mimosa
Théâtre de l'Optimist
Rue Guillaume Puy Avignon
du 3 au 21 Juillet 2024 à 18h30
« L’Afrique Bordel de merde, c’est le tombeau des blancs. »
Dernière phrase du film Equateur prononcée par Timar, Francis Huster dans le film Equateur de Gainsbarre.
« En fait la musique, c’est le film. »
Gainsbourg pour son film Equateur
Dans La parenthèse du Mimosa les deux personnages, un père qui s’ignore et sa fille qui veut le rencontrer pour l’aviser de cette filiation, déploient leurs rôles sur fond d’Afrique. Elle est partout. Avant tout elle inonde les veines d’un « apatride » baroudeur resté en friche et en cale d’un amour abandonnique. Il tient un bar quelque part au Sénégal, mais ce pourrait être n’importe où sur ce continent où les nuits s’habitent et se vivent dans l’assourdissement des insectes, une hygrométrie d’aquarium.
Un homme un peu las, comme émoussé, érodé par des pensées revenues de tout, sur le point de fermer tardivement le bar, voit survenir, passée au baptême de la pluie diluvienne, une jeune femme. Elle s’impose et s’oppose à la fermeture imminente du bar et, quoique fatigué et souhaitant aller dormir, il lui sert un dernier verre. Elle aligne alors les questions personnelles si bien qu’assez vite, elle révèle le pourquoi de son insistance à demeurer étrangement, en pleine nuit, dans ce bar paumé en compagnie d’un vieux grincheux alcoolique peu aimable et non disposé à lui tenir compagnie. L’écriture tisse deux rôles parfaitement ajustés. Jean-David Stepler et Violaine Brébion, interprètent avec un belle maitrise leur rôle et les font évoluer de concert sans heurts avec une belle synchronicité. Certes Grégoire Aubert sert comme à son habitude, une pièce riche en écriture et pétrie d’émotions. Il y déploie un répertoire difficile à mettre en scène, celui du refus ou déni de paternité. A la difficulté évoquée d’assumer cette paternité tardive, se double celle du deuil de l’abandon amoureux assortie à la déréalisation du ressenti traumatique. L’écriture des lettres d’amour, selon lui, en fait, véritables listes de reproches tous aussi futiles que dérisoires et insoutenables de mauvaises foi larvée de bêtise place l’autodérision au coeur de la relecture du personnage.
Jean- David Stepler, figure de démiurge dramatique dans Chocolat Piment, visite dans La parenthèse du mimosa un rôle qui se métamorphose et s’écrit dans le même temps qu’il se joue. C’est fin, intelligent, enlevé et on y est dans ce bar, spectateur silencieux, attentif et curieux. Les tableaux scandent les moments propices et le décor en rotation souligne les changements de plans très cinématographiques. La mise en scène de David Teysseyre crée une atmosphère très particulière à ce lieu unique, comme une parenthèse propice à l’émergence du personnage du père.
La parenthèse du Mimosa s‘écrit comme elle se vit devant son public. La trompette de Miles Davis celui qui, dos au public, jouait à nous fermer les yeux, renforce la touche esthétique. L’émotion à fleur de peau circule entre le père et la fille et ce lieu improbable, comme excepté du quotidien, délivre, dans la magie de la nuit, la part de vérité ardemment souhaitée et conquise par la fille.
Le bar, comme un accessoire bien exploité du personnage du père lui permet de l’aborder dans un lieu publique où son désir de dire fonctionne comme l’élément déclencheur. Ce qui se joue finalement c’est tout ce que le baroudeur tait et ignore sans véritablement être dupe de lui même et de ses constructions personnelles vacillantes.
Laissez-vous embarquer…
Nadine Eid
De Grégoire Aubert avec Violaine Brébion & Jean-David Stepler
Mise en scène David Teysseyre
création lumière Vincent Lemoine
création sons Benjamin civil
Nadine Eid
Metteur en scène: David Teysseyre
ave: Violaine Brébion, Jean-David Stepler
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