La fille polaire

Théâtre des lila’s

8 rue Londe Avignon

du 2 au 21 juillet 2024 15h40 jours pairs 20h40 jours impairs relâche le 8 et le 15

Ce qui aurait pu être pour Camille un beau cadeau, se transforme peu à peu en un cauchemar dont elle aura du mal à émerger. Reconnue pour son talent, elle a gagné un concert mais n’a qu’un mois pour se préparer à cette belle opportunité. Consciente des enjeux et du peu de temps dont elle dispose, elle va mobiliser toutes ses forces et toute son incroyable énergie pour parvenir à ses fins, « créer le spectacle du XXI ème siècle ».

Elle oublie de s’alimenter, en perd l’appétit et le sommeil. Assez vite, elle se laisse emmener par ses émotions et la peur de ne pas être à la hauteur des ambitions qu’elle s’impose va avoir raison de son équilibre mental. Elle développe des syndromes délirants propres à la paranoïa et des manifestations de toute puissance qui vont l’amener à l’internement en unité psychiatrique.

C’est un spectacle musical et intimiste, original et bouleversant que propose La Fille Polaire.

Qu’il s’agisse de l’interprétation des compositions piano-voix de Camille Feist ou du remarquable travail de mise en valeur du texte de Marie La Mesta, le public ne peut que s’incliner bas.

Au service d’une mise en scène des plus judicieuses de Pauline Paris, le talent de deux comédiennes se conjugue et parvient à tisser un univers empli de poésie et de charme. Une présentation d’objets personnifiés figure les scènes en flashback et le récit du vécu de cet épisode psychiatrique va très sobrement nous apparaître comme puissamment traumatique.

Le thème central du placement ou enfermement par les proches est évoqué mais avec un point de vue presque clinique. Les mots sont étiquettes, et le corps parle lui des émotions et des ressentis. La peur envahit tout, le projet de Camille dans ses limites temporelles interroge la coercition et sa légitimité est interpellée. Il y a Camille et Camille, celle qui vrille et celle qui s’observe vriller tout en vrillant. Camille et sa conscience, ce qu’elle sait reconnaître de son état bipolaire. La frontière entre les deux est ténue, elle questionne le rapport du patient avec les soignants et les autres malades.

Le traitement qui s’évertue à éviter les bouffées délirantes et les états extrêmes, éradique la survenue de ces états qui laissent le patient rompu.

La voix de Camille Feist, les paroles de ses textes soutenues par le piano et le kalimba ne nous quittent pas à la sortie du spectacle.

L’espoir est bien présent et l’épisode en psychiatrie aura été le lieu de belles rencontres et l’occasion d’un cheminement indéniable.

La fille polaire sort grandie de cette expérience et aguerrie dans ses limites et ses possibles.

A voir et à écouter.

Nadine Eid

de et avec Camille Feist

collaboration artistique et jeu Marie La Mesta

mise en scène Pauline Paris

écriture Camille Feist et Pauline Paris

Chansons Camille Feist

création lumière Angélique Bourcet