Gisèle Halimi, une farouche liberté

La Scala 600 Avignon

Le 28 Janvier 2025 à 19h30

photos: Thomas O' Brien

Le 28 janvier 2025, La Scala Provence a vibré sous les mots et les combats d'une figure du féminisme et de la justice : Gisèle Halimi. Portée par la puissance des textes co-écrits par elle-même et la journaliste Annick Cojean, la pièce « Gisèle Halimi, une farouche liberté » nous a offert un spectacle intense et engagé, interprété par Marie-Christine Barrault et Hinda Abdelaoui.

Dès l'ouverture du rideau, le décor sobre impose une austèrité : un long mur, évocation des dunes du Sahara et de la méditerranée, cadre le plateau. Il ne s'agit pas seulement d'un fond de scène, mais d'un témoin muet des luttes d'une femme hors du commun, d'un espace-mémoire où résonnent les combats d'une vie. Face à ce mur, deux femmes prennent la parole. Elles ne jouent pas, elles incarnent. Elles portent la voix d'une combattante, celle qui n'a jamais cessé de s'insurger contre l'injustice, défendant inlassablement les droits des femmes et la dignité humaine.

Le texte, dense et percutant, retrace les instants décisifs de la carrière de Gisèle Halimi. Des premières révoltes enfantines , notamment sa grève de la faim à 11 ans pour refuser la soumission familiale aux batailles judiciaires les plus retentissantes, ce spectacle donne à entendre une parole sans concession.

L'évocation des procès emblématiques où Gisèle Halimi a plaidé avec une ferveur inébranlable, la torture pendant la guerre d'Algérie, la défense du droit à l'avortement, le combat contre la culture du viol… Autant de causes qui ont fait d'elle une avocate irrévérencieuse et une femme politique engagée. Chaque mot est pesé, chaque phrase sonne comme une révolte qui continue d'ébranler nos consciences.

Marie-Christine Barrault et Hinda Abdelaoui habitent littéralement ce texte. Avec sobriété, elles insufflent vie à cette parole, l'incarnant dans toute sa puissance et sa complexité. La première, grande figure du théâtre et du cinéma, livre une performance vibrante d'émotion. Pieds nus sur scène, elle vacille à quelques reprises sur le texte mais retrouve immédiatement sa justesse, prouvant qu'un écart peut aussi être une preuve d'humanité. La seconde, plus jeune mais non moins intense, témoigne d’une présence scénique impressionnante.

L'une et l'autre ne cherchent pas à imiter mais à lui redonner chair à travers sa parole. Elles sont en colère, déterminées, vibrantes. Elles disent l'enfance blessée, l'exigence de réparation, la difficulté de s'imposer dans un monde dominé par les hommes. Les mots de Gisèle Halimi, portés par ces deux voix, deviennent un cri, une transmission.

Dans la grande salle de six cents places de la Scala Provence, la ferveur du public ne trompe pas, l'adhésion est totale. A la fin du spectacle, une standing ovation méritée déferle. On n'applaudit pas seulement une performance théâtrale, mais aussi une vie de combat, un héritage précieux qui continue d'éclairer nos luttes contemporaines.

Un spectacle qui rappelle que la justice et l'égalité ne sont jamais acquises, qu'elles se conquièrent chaque jour, avec la même "farouche liberté" qui animait Gisèle Halimi.

Fanny Inesta

Mise en scène: Léna Paugam

Avec: Marie-Christine Barrault et Hinda Abdelaoui